Kiss my
Doll
Sculpture,
performance and video
2019
EN
The scene of the proposal: a mini intimate
theater where the spectator, in front of a stage curtain but in a very cramped
space, is observed, filmed, and knows that his reactions will be observed then
in a second almost psychoanalytic staging : an armchair - so timeless that it becomes
theatrical in turn - where a second spectator alone is invited to observe on a
very old cathode-ray screen that looks like a peep show the first spectator who
struggles caught in the nets of an indecent proposal. And almost so on and on,
in an endlessly amplified staging of the fundamental Duchampian voyeurism of
the first proposal.
The indecent proposal: kissing the
artist’s silicone mask, realistic and carefully made up, seductive and
impassive, whose only mouth moves with a very slow and mechanical movement,
like a kind of erotic invitation to kiss the artist, her troubling lips parted
and offered, but forbidden of any reality.
The Doll: a silicone mask, whose robotic
interior is visible, stands at human height on a metal rod, confronting a very
meticulous reconstruction of the texture of the artist's face and skin, her
mouth ajar and eyes closed, eye-lids painted, sleeping beauty offered as an
object of desire, but in a hopeless distance from reality. The Doll - a visibly truncated model - then
becomes the woman seized in man’s monomania and obsession, an amorous object
that passively obeys the simulacra of movement imposed by our obsession. The Doll allows us to reduce the human to an
exclusive project of pleasure, to a seductive offer of the foreseeable
satisfactions of repetition, without the risks of refusal, the unpredictable
whims of love, and the dizzying complexity of the actual humans. She is as
desirable as Ava in Ex Machina but
asleep and waiting, in a cruel tale that is almost a parody of Snow White, the
lover's kiss to wake her up. But what strength would it take for a lover to
give life to a silicone mask, to a mechanical princess that no lover will ever
get out of sleep, from her irremediable loss of feelings, to make her win,
beyond a pleasure glimpsed but ultimately refused, an unattainable humanity?
Words by Serge Salat
FR
La scène de la proposition : un mini théâtre intime où le spectateur, placé face à un rideau de scène mais dans un espace très exigu, est observé, filmé, et sait que ses réactions seront ensuite observées à leur tour dans une seconde mise en scène, presque psychanalytique : un fauteuil — si intemporel qu’il en devient théâtral — où un second spectateur, seul, est invité à observer, sur un très ancien écran cathodique évoquant un peep-show, le premier spectateur, qui se débat, pris dans les filets d’une proposition indécente.
Et ainsi de suite, à l’infini, dans une mise en abyme amplifiée du voyeurisme duchampien fondamental de la première proposition.
La proposition indécente : embrasser le masque en silicone de l’artiste, réaliste et soigneusement maquillé, séduisant et impassible, dont seule la bouche s’anime d’un mouvement lent et mécanique — une sorte d’invitation érotique à embrasser l’artiste, ses lèvres troublantes entrouvertes et offertes, mais interdites de toute réalité.
La Doll : un masque en silicone, dont l’intérieur robotique est visible, se dresse à hauteur d’humain sur une tige métallique, face à une reconstitution minutieuse de la texture du visage et de la peau de l’artiste, la bouche entrouverte, les yeux clos, les paupières peintes — belle au bois dormant offerte comme objet de désir, mais dans une distance désespérée avec la réalité.
La Poupée — modèle visiblement tronqué — devient alors la femme saisie dans la monomanie et l’obsession masculines, un objet d’amour qui obéit passivement aux simulacres de mouvement imposés par notre obsession.
La Poupée nous permet de réduire l’humain à un projet exclusif de plaisir, à une offre séduisante des satisfactions prévisibles de la répétition, sans les risques du refus, les caprices imprévisibles de l’amour et la vertigineuse complexité des êtres réels.
Elle est aussi désirable qu’Ava dans Ex Machina, mais endormie et en attente, dans un conte cruel qui frôle la parodie de Blanche-Neige — le baiser du prince pour la réveiller.
Mais quelle force faudrait-il à un amant pour donner vie à un masque de silicone, à une princesse mécanique qu’aucun amour ne tirera jamais du sommeil, de sa perte irrémédiable de sentiments, pour lui offrir, au-delà d’un plaisir entrevu mais finalement refusé, une humanité inaccessible ?
Texte de Serge Salat